Ma façon de travailler

Comment ça, tu oses nous dire que tu travailles ?

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Je suppose que chaque personne qui me donne un conseil non sollicité sur mon travail a de bonnes intentions. En même temps, depuis que j'ai arrêté d'accorder de l'importance à ce torrent d'opinions contradictoires, je suis devenue plus organisée et plus productive.

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Je préfère me pencher avec attention sur des témoignages d'illustratrices ou d'autrices qui ont atteint leurs objectifs en plus d'une certaine notoriété, et qui racontent leurs débuts. 

J'ai remarqué que ces trois conseils sont ceux qui reviennent presque systématiquement :

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1. Prendre le temps.

Pour réfléchir à qui on est et à son public cible. Impossible de plaire à tout le monde.

Être authentique, c'est ça qui est vendeur. Et ça demande de la réflexion* et de la documentation ; ça ne se fait pas du jour au lendemain !

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2. Commencer petit

Chercher à proposer beaucoup de produits dès le départ, c'est une perte de temps, d'argent et d'énergie assurée. 

La rentabilité est infiniment plus importante que la quantité de ventes. 

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3. Laisser les réseaux à leur place

Le nombre d'abonnés et de likes, ou la quantité de plateforme utilisées n'est absolument pas gage de revenus. 

Courir après la notoriété et la visibilité conduit au burn out et n'augmente ni la créativité, ni les ventes.

Du coup, en pratique ça donne quoi ?

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Je m'aménage des temps de réflexion et de recherche

Dans mes carnets, il n'y a pas que des dessins. Il y a aussi beaucoup de notes.

Je m'efforce de faire du tri dans mes idées et mes projets en cours. Je me rappelle mes objectifs à long terme : faire tourner ma boutique d'illustrations et éditer ma BD. Est-ce qu'entreprendre ci ou ça va plutôt me rapprocher ou me détourner de ces objectifs ?

Je cherche à alimenter et à commenter les livres, les œuvres, les illustrations, les photos que je prends comme références**. Pourquoi est-ce que je trouve le dessin de tel auteur si pertinent ? Comment expliquer pourquoi j'aime telle image ? Comment réutiliser ce que j'ai compris pour améliorer mes propres dessins ? Quels mots, formes, objets, sensations, couleurs caractérisent mon univers ? 

Ce sont des moments pendant lesquels je ne suis pas visiblement productive. Pourtant, ils font toute la différence ; plus je m'y attelle sérieusement, plus je suis efficace une fois que je me remets au travail. 

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J'anticipe et je calcule

Je note le prix des différentes impressions et des différents papiers ; je cherche avec quel format de print lancer la boutique sans prendre de risque financier inutile. Je prends en compte mon temps de travail, la somme que va me prélever l'URSSAF sur mes revenus, etc... Je fais des recherches sur la bonne façon de fixer un tarif, de rédiger des conditions de ventes, d'emballer et de suivre un colis, de gérer un imprévu avec la poste (ma pire angoisse)... 

 Je me renseigne sur les parcours d'auteurs qui ont réussi leur auto-édition dans la BD, sur les difficultés qu'ils ont rencontrées.  Sans surprise : ça leur a pris des années. Je cherche une vision aussi réaliste que possible. 

J'ai un cahier qui est exclusivement réservé à mes notes sur la logistique et la comptabilité. Le but est de ne pas sous-estimer tout l'investissement que nécessite même le plus simple des projets. 

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Je déconnecte souvent 

Ces derniers mois, il y a des semaines où je ne poste rien sur les réseaux, voire où je ne me connecte même pas ; c'est bon pour ma santé et contrairement aux idées reçues ça n'a pas de graves conséquences sur ma visibilité, ni sur ma relation avec mes abonnés. J'essaie de rester régulière, mais je n'en fais pas une priorité. 

Je ne me force pas non plus à créer du contenu exprès pour instagram si je n'ai pas terminé des tâches plus importantes. Résultat : moins de quantité, plus de qualité dans ce que je poste, et les gens interagissent davantage avec. 

En fait, j'apprends à considérer ma santé mentale et physique comme une ressource encore plus importante que mon capital financier. Si je ne fonctionne pas bien, impossible que mes projets fonctionnent. Alors, par exemple, sur chaque journée de travail, prendre une pause pour faire du sport, sortir prendre le soleil, me cuisiner un repas équilibré qui me fasse plaisir et le manger dans le calme sans me presser, c'est plus de l'ordre du bonus ; avec le temps, c'est devenu non négociable.

Tout ça pour dire ?

Impossible d'être efficace sur le long terme et d'atteindre ses objectifs si on agit dans la précipitation, si on écoute l'avis de tout le monde et si on ne respecte pas ses besoins et son rythme. Ça vaut pour moi, comme ça vaut pour tous les êtres humains.

J'aspire vraiment à un monde dans lequel on est tous ok avec cette idée, pas seulement en théorie, mais surtout dans la pratique. 

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Au moins, Zac est ok.

 

fin de l'article

 

 

Notes

*Marie Bambelle, la créatrice du podcast L'illustratrice Ambitieuse  fait cette pertinente remarque dans l'un de ses épisodes : "On ne vend pas un éclair au chocolat qui n'est pas encore cuit ! Votre problème, c'est que vous faites tout à l'envers. Vous commencez à communiquer sur les réseaux alors que votre offre n'est même pas définie. Travaillez d'abord sur ce que vous avez à proposer, et c'est seulement une fois ce travail terminé que vous devriez vous lancer dans la com intensive sur Instagram." 

**Par contre, pas besoin d'avoir vingt-mille références plus snob et mondaines les unes que les autres.  Il y a des jours ou le "connaître ses classiques", ça me donne la gerbe. Premier degré : ce qui est considéré comme vulgaire aujourd'hui a de fortes chances de devenir un incontournable dans 15 ans. Svp, les amis dessinateurs ou artistes de tous niveaux qui lisez cet article, n'essayez pas de rentrer dans un moule pour impressionner les bobos ou plaire aux profs. D'accord, c'est important de s'ouvrir l'esprit et de reconnaître qu'on sait peu de choses, mais c'est pas la course  à qui lira le plus de livres non plus. Pendant mes études, je croyais que mes influences  artistiques n'étaient pas légitimes : pas assez nobles, pas assez sophistiquées, et surtout, pas assez nombreuses. Je me mettais une de ces pressions... Que de temps perdu et que d'occasions manquées d'oser partager ma culture avec ceux qui m'entouraient ! Cette citation de Alexandre Astier m'a aidée à guérir "Je suis plutôt 100 fois 1 film que 1 fois 100 films." Same messire, same.